Expo photo / Ce que murmurent les fantômes de Sophie Zénon
Subtile et énigmatique, l’œuvre de Sophie Zénon orne les murs de l’Imagerie de Lannion jusqu’au 8 juin prochain à l’occasion une rétrospective inédite. Ce que murmurent les fantômes, dénouement provisoire d’une épopée émancipatrice, regroupe les œuvres maîtresses d’une quête longue de vingt années d’exploration et d’introspection. 400 m2 sont dédiés à des intimes récits de voyages. De premiers séjours en Asie, aux réalisations plus récentes sur le pouvoir de la mémoire familiale, l’exposition plonge le visiteur dans l’univers polysémique d’une artiste complexe.
La dimension symbolique et historique des clichés de Sophie Zénon témoigne d’un véritable travail de recherche empirique. Plasticienne et documentariste, elle évoque avec spiritualité les étapes de son existence. Sa fascination pour le sacré, le mystère et le chamanisme donne à sens à ses clichés. Les objets rencontrés, les émotions perçues et les lieux de passage sont figés dans le temps comme les emblème de souvenirs indélébiles.
L’aigre-douceur de la mémoire
La perte de ses parents amène progressivement l’artiste à constituer d’intimes carnets visuel et sensoriel. Reconstruction photographique de l’absence, l’ensemble des clichés semble combler le vide qu’implique le manque et témoigner d’une quête identitaire, d’une existence en construction.




Pour Vivre ici et Enfance, clôturent un cycle mémoriel entrepris en 2010 avec la réalisation d’Arborescences.
Voyager pour renaître

Haïkus Mongols est une invitation. Cette première série en noir et blanc reconstitue un périple de huit années au cœur des terres mongoles. Empreints d’une poésie inquiétante, ces images révèlent la sensibilité de l’horizon. Chaque cliché exalte la fascination de l’artiste pour le sacré et les espaces désertiques si bien que l’immensité semble être subtilement liées aux visages de ces hommes, alors saisis au plus près de leur âme. Les ombres murmurent l’amertume des choses et imprègnent le spectateur d’une une fragile mélancolie. Sophie Zénon cerne l’humilité de la lumière et rend à cette nature pourtant acrimonieuse, toute sa grâce.

Un carnet de voyage aux multiples tonalités gris-sépia raconte la poursuite de son épopée le long du fleuve Amour en Sibérie extrême-orientale. Parmi les pêcheurs et les âmes solitaires, le long des îles dénudées et des terres bordées de villages, Suite Sibérienne semble nouer un lien particulier avec l’humanité. Tantôt cachés par l’objet, tantôt recouvert de lumière, le mouvement des corps et la forme des visages ne s’imposent pas à l’œil dépourvu de sensibilité, il faut les deviner, les laisser se dévoiler seuls au regard de ceux qui sauront déceler leur fragilité.

Sicile, sous le volcan semble alors mêler quête de spiritualité, l’envie de découvertes et la puissance de la mémoire. Les collines contrastées de Madonie s’élèvent pour révéler des visages anonymes ressuscités par les Puces de Palerme, les terres ascétiques et sauvages accompagnent la dureté des regards de ces personnages encore vacillant entre la vie et la mort. Discrète et ténébreuse, cette Sicile cultive la « déréliction ».
L’exposition Ce que murmurent les fantômes de Sophie Zénon est à découvrir jusqu’au 8 juin 2019 à L’Imagerie de Lannion :
http://galerie-imagerie.fr
Photos : © Sophie Zénon